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Regards sur le quartier

Je vous écris du nouveau printemps

Extrait du poème de Serge Pey, Pour Cesare Vanini, 2008. Direction artistique Atelier Choque Le Goff.

Serge Pey

“Pour Cesare Vanini” est un poème du poète et plasticien Serge Pey, figure de la poésie-action et de la ville de Toulouse. Il fut écrit en hommage au philosophe et théologien italien Cesare Vanini exécuté à Toulouse pour blasphème et athéisme par l'Inquisition en 1619. Le texte raconte la ville au prisme de la vie, de l’exil, de la persécution puis de la mort de Vanini. 

Le texte dans son intégralité

“Ma vie a une ville et deux vies sous son vide
Ma vie a deux villes et un vide et une île
Ma vie a un vide moins une ville sous une île
Ma vie a deux vides plus une ville
Ma ville est un pont à l’envers sur le vide
Ma ville pêche deux rives et une vie au bord d’une île
Ma ville est un fleuve aux rives soudées dans une île
Ma ville a une vie moins deux vides plus une île
Ma ville a deux vies et un vide comme une île
Ma ville a une île et deux vies et trois vides
Ma ville a deux rives moins une vie divisée par une île
Ma ville est une île au-dessus de ses rives
Ma ville pèse deux vies au bout de son île
Ma ville unit ses rives dans une île qui roule dans le vide
Ma ville est une île devant la prison rouge d’une rive
Ma ville accouche d’un pistolet et d’une vie dans le vide
Ma ville a deux ils et deux elles et deux rives dans sa ville
Mon vide a deux villes plus une vie sous le vide
Mon vide a une vie moins une ville multipliée par son île
Mon vide a deux vies plus une ville avec deux vies dans le vide
Mon vide a une ville moins une vie plus une île et une rive
Ma ville a deux îles trois vies quatre rives et cinq vides
Ma ville enlève le r de sa rive pour écrire la vie sur le vide
Ma ville garde la vie dans le vide d’une île
Ma ville est une île dans un homme qui boit le vide
Ma ville est une vie qui brûle comme une île
Ma ville est une rive qui hisse le drapeau du vide
Ma ville est une île arrachée du vide qui enferme la ville
Ma ville est le noeud de deux rives au-dessus de son île
Ma ville est une vie qui retourne le vide sur une rive
Ma ville est une ville moins une ville plus une ville
Ma ville est une vie qui déracine le vide de son île
Ma ville est une vie qui s’ajoute à la ville
Ma rive est une île qui nage dans le vide
Ma rive a un vide et deux vies sous un autre vide
Ma rive traverse le vide avec le bateau d’une île
Ma rive rassemble ses os sur une roue dans une île du vide
Ma ville est une vie comme une île au-dessus du vide
Ma ville est le nombre d’une île qui vide le vide
Ma ville rassemble deux vies sur une seule rive
Ma ville est une vie dans la rose de deux rives
Ma ville a un vide ouvert par une vie et une rive
Ma ville a trois vies et trois îles et trois rives
Ma ville est une ville au centre d’une île
Ma ville est une rive vide devant la prison du vide
Ma ville a une ville plus une ville au-dessous du vide
Ma ville a deux villes moins une vie et plus une île
Ma ville a deux vies plus une vie et deux vies dans le vide
Ma ville est une île qui brûle le vide dans une île
Ma ville est une rive qui retourne le vide pour faire une île
Mon vide est une ville moins une ville
Ma rive est une île d’une seule rive
Ma vie a deux îles au-dessus de la ville
Mon île est une vie Mon île est une ville.” 

Biographie

Serge Pey est né en 1950 à Toulouse d’une mère couturière et d’un père ouvrier du bâtiment réfugié politique de la guerre civile espagnole. Ses années d’enfance marqueront durablement l’engagement de sa vie solidaire auprès des mouvements de libération, de résistance ou d’espérance. Tôt, dans son enfance, il entre en contact avec la poésie espagnole et française. Garcia Lorca, Miguel Hernandez, Pablo Neruda, François Villon, Guillevic, Rimbaud, veilleront sur ses récitations d’écolier. Dans « La boîte aux lettres du cimetière », il raconte la liaison particulière qu’il entretient avec Antonio Machado.
Poète d’action, plasticien, romancier, philosophe du poème, il est l’auteur d’une centaine de publications en France et à l’étranger. À la fin des années soixante-dix, il commence ses « Dictées de poèmes ». Sur des cahiers qu’il distribue au public, des dizaines de manuscrits seront retranscrits de cette façon par l’assistance, qui les signe ensuite en commun avec lui. De la ville et du Fleuve, ou Prophéties (Tribu), sont issus de ces happenings d’autoédition collective.